Ces derniers mois, plusieurs membres du gouvernement avaient exprimé leur souhait d’allonger la durée du congé paternité. C’est finalement le président de la République, Emmanuel Macron, qui a annoncé son doublement de quatorze à vingt-huit jours, mercredi 23 septembre, lors d’un déplacement dans un centre de protection maternelle et infantile (PMI) de Longjumeau (Essonne).
Instauré en janvier 2002, le congé paternité est une piste de réponse à plusieurs enjeux de société : l’implication des pères dans l’éducation des enfants, le rééquilibrage des tâches familiales, mais aussi l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes, la maternité étant clairement identifiée comme un frein à la carrière de ces dernières.
Le congé paternité est ouvert au conjoint salarié de la mère de l’enfant « ou [à] la personne salariée liée à elle par un pacte civil de solidarité ou vivant maritalement avec elle ». Actuellement fixé à quatorze jours – trois jours de congé de naissance à la charge de l’employeur et onze financés par la branche famille de la Sécurité sociale –, il passera donc à vingt-huit jours, avec une prise en charge inchangée pour l’employeur.
L’annonce de cette réforme intervient après la remise d’un rapport d’une commission d’experts dirigée par le neuropsychiatre Boris Cyrulnik sur les « 1 000 premiers jours » de l’enfant, le 8 septembre. Elle est cependant moins ambitieuse que les recommandations de la commission en la matière, qui proposait d’allonger le congé paternité à neuf semaines, fractionnables, au nom des « effets positifs sur le développement de l’enfant ».
Entrée en vigueur en juillet 2021
La mesure, qui figurera dans le prochain projet de loi de financement de la Sécurité sociale, « entrera en vigueur en juillet 2021 ». Sa charge financière est évaluée entre 250 millions et 260 millions d’euros pour 2021, et autour de 500 millions d’euros à partir de 2022, pour une année complète.
Partant du constat que le recours au congé paternité a peu bougé depuis sa mise en œuvre – il est de l’ordre de 67 % –, le gouvernement envisage en outre d’introduire « une part obligatoire » pour ce nouveau congé, sur le modèle en vigueur pour le congé maternité, dont la moitié (huit semaines sur seize) est obligatoire. Elle sera finalement de sept jours, a précisé Emmanuel Macron mercredi.
« Pour nous, l’obligation, c’est à la fois un enjeu de protection, mais aussi de justice sociale pour que le congé paternité soit bien accessible à tous, indépendamment de la nature du contrat de travail du deuxième parent », argumente-t-on à l’Elysée.
Si environ sept pères sur dix ont actuellement recours au congé paternité, de fortes disparités entre ses bénéficiaires potentiels existent. Comme le relève un rapport de l’inspection générale des affaires sociales sur le sujet, le taux de recours est bien plus élevé chez ceux qui occupent un emploi stable. Il est de 80 % chez les salariés en CDI et de 88 % chez les fonctionnaires, contre 48 % chez les pères en CDD et 13 % dans la catégorie des demandeurs d’emploi.
Une amende de 7 500 euros est envisagée pour contraindre les entreprises à respecter ce nouveau droit. Les contours de l’ensemble du dispositif figureront dans un texte soumis au Parlement au début de 2021.
« Certes, cela va dans le bon sens d’avoir un congé plus long pour le second parent, qui permette à la fois plus de sérénité à l’arrivée d’un enfant et probablement un partage des tâches plus égalitaire entre les hommes et les femmes, observe l’économiste à l’Observatoire français des conjonctures économiques Hélène Périvier. Mais la France gagnerait à engager une réflexion plus globale et ambitieuse sur la refonte de sa politique familiale. » Un chantier bien plus vaste, qui consisterait à « réarticuler le service d’accueil de la petite enfance avec un congé parental repensé ».
A l’heure actuelle, la France est à cet égard plutôt en queue de peloton, avec un congé parental long (deux ans), mal indemnisé – l’équivalent du tiers d’un smic – et de fait délaissé par les pères (98 % des parents qui le prennent à taux plein sont les femmes). La commission des « 1 000 premiers jours » propose donc de le réduire à neuf mois partageables entre les parents, et rémunéré à 75 % du salaire. Une réforme « qui demande à s’inscrire dans un temps un peu plus long », répond-on à l’Elysée, en la remettant à plus tard.